#162 – Montpelliérien #162 – Les âmes sombres sous la pluie

Les hélicoptères tournent dans le ciel. Ou les avions de chasse. Je ne sais pas, mes volets sont fermés pour contrer le soleil cuisant qui vient frapper en plein sur ma fenêtre à cette heure-ci. Et croyez-moi, il frappe dur. À Lyon, où se trouve actuellement mon amie, il grêlait il y a quelques heures, et maintenant : « il pleut des tonnerres ». Ne posez pas la question, je ne sais absolument pas ce que ça veut dire. C’est ça l’avantage d’être en couple avec une personne dont le français n’est pas la langue maternelle, le moindre SMS devient une énigme. Bref, je vous ai parlé des aviocoptères, du soleil à Montpellier, du temps qu’il fait à Lyon, des inventions poétiques inter-langagières de mon amie… Et moi ? Qu’est-ce que je fais, moi ? Est-ce que je fais mes cartons ? Non. Ne me jugez pas. Je suis enfermé dans ma chambre. Je joue aux jeux vidéo pour calmer mes nerfs. J’ai dit ne me jugez pas ! Ça ne marche pas très bien car je joue à Dark Souls II. La série étant bien connue pour déclencher des crises de frustration chez les joueuses·rs tant les échecs sont douloureux à vivre. « Ça se dit pas ? » me demande mon amie. Non, ça se dit pas, il pleut des tonnerres. Donc, je ne joue pas aux jeux vidéos (jeux vidéo ou jeux vidéos ? Débattez). Je joue à un jeu vidéo en particulier. Le plus agressif pour les nerfs qui soit (à moins que ce ne soit le premier ou le troisième opus de la série qui mérite réellement ce titre). Mais ce n’est pas plus mal. Ainsi, je n’ai pas le temps de m’agacer de quoi que ce soit d’autre. Et puis c’est beau, en tout cas pour moi qui n’ai une console moderne d’il y a douze ans que depuis six mois seulement. Le jeu lui-même est très esthétique. Faut juste être un peu gothique, quoi. Paysages soignés de châteaux en ruines, de caves inondées, de grottes obscures, le tout peuplé de spectres armés, de chevaliers pourrissants, de rois maudits, de monstres ogroïdes, de dragons cracheurs de feu, de squelettes surgissant des brumes au détour d’un couloir… « Il pleut comme si la vache pisse », tente-t-elle de conclure. C’est pas exactement ça, mais vous avouerez qu’on se rapproche. Je suis gentil, je lui fais des propositions : « il pleut comme vache qui pisse », ou alors : « il pleut des cordes. » Bon. Cinq/six coups et vous êtes morts. Chaque nouvel ennemi a ses façons bien personnelles de vous trucider, et vous ne les connaitrez qu’en le combattant. Donc vous mourez à tout bout de champ. À chaque fois que vous mourez, votre barre de vie est réduite pour la session suivante et vous perdez toute la monnaie (des âmes) grâce à laquelle vous comptiez faire augmenter votre niveau dans le but de mourir moins vite. Celle-ci reste disponible sur le lieu de votre mort, mais vous repartez généralement de très loin et devez vous refarcir tous ces combats atroces, et si vous mourez à nouveau avant de l’avoir récupérée, cette bourse d’âmes, elle disparait définitivement. Vous n’avez qu’à recommencer. Une trois-centième fois. Oh, ne faites pas vos étonnés, je vous avais déjà dit que j’étais un peu masochiste. Mais résultat, ça marche impec. Je ne pense plus au déménagement. « Il pleut des chiens et des chats ? » hasarde-t-elle. Oui. De l’autre côté de la Manche, oui, ça marche. Mais franchement, ici, à Drangleic, ça sonne bizarre.

#161 – Montpelliérien #161 – Tri hyper-sélectif

Tant de livres, si peu de cartons…

Je me demande si je ne vais pas devoir en revendre, des livres. D’ailleurs je suis ruiné. Je fais l’innocent, mais je sais qu’il me faut en revendre, pour la place et pour l’argent. Mais c’est trop dur. Jamais je ne pourrai me séparer des bouquins de Cavanna, de DDT ou de Berroyer. Ce n’est même pas la peine d’y penser. C’est ma sainte trinité des écriveurs à moi. Quant à mon rayon littérature anglophone, pfff… il doit bien y en avoir un ou deux dont je me consolerai d’avoir dû me séparer, mais qui m’achèterait ça ici ? Ce ne sont pas des ouvrages au programme des fac d’anglais. Bon, en tout cas personne ne touchera à mon rayon poésie. Hugo, d’Aubigné, Verlaine… Non ! Je les aime trop. Si je les connaissais par cœur, encore, ça irait. Mais j’ai vraiment une trop mauvaise mémoire, impossible d’apprendre des poèmes, même des courts. Même les miens. Bon okay, Mallarmé, Apollinaire et Rimbaud me font super chier, je peux les revendre avec les recueils nuls, dont celui réalisé par Pompidou. Oui, oui. Ce Pompidou-là, Georges. Président de la République. Il a élaboré une anthologie de la poésie française. Enfin, une anthologie pompeuse de la poésie française chiante. On n’a clairement pas les même goûts. C’est sans doute pourquoi je ne suis pas président de la république aujourd’hui. Je me demande bien ce que Macron lit —s’il en lit— en poésie. Je ne sais pas s’il existe une édition d’Options, futures et autres actifs dérivés en alexandrins. Bon je me perds. Dans tous les cas, si j’arrive à tirer 10€ de l’ensemble Malarmé-Apollinaire-Rimbaud-recueils divers, ce sera le bout du monde. La poésie, aujourd’hui… Mieux vaut boursicoter. Et le rayon littérature japonaise ? Vous n’y pensez pas ! Comment est-ce que je vais garder la motivation pour apprendre cette langue si peu intuitive aux francophones si je ne peux pas m’immerger dans l’univers des meilleurs·es auteurs·es la pratiquant ? Ah non, hein ! Je vous ai vu·e !! On ne touche pas au rayon sciences !! J’y tiens. Enfin, en partie. J’avoue n’avoir jamais ouvert cet immense Genes de Benjamin Lewin. Mais un jour peut-être… Même si c’est une édition qui approche bientôt les quarante ans et qu’on en sait beaucoup plus aujourd’hui… Ça me rassure de le savoir là… Non allez, ça c’est vraiment bête. Il faudrait au moins que je le donne. C’est trop lourd, ce n’est plus à jour. Okay. Ça fait un livre en moins sur les trente cartons que je vais devoir me trimballer. Les bouquins de théorie musicale, d’histoire de la musique et les biographies de musiciens, par contre, bas les pattes. Même si trois biographies de Tom Waits, je l’avoue, c’est trop. Mais j’y tiens. Hum. Est-ce que j’y tiens encore, en vérité ? Peut-être plus tant que ça. C’est très ragots people états-uniens tout ça. Ça en devient même assez chiant. J’en garderai peut-être une tout de même, celle qui parle le plus du contexte de la fabrication de chaque album. Et les classiques de la littérature française ? Je pourrais quand même les foutre dans des boîtes à livres, du moins ceux qu’on retrouve à 1€ au format poche chez n’importe quel bouquiniste. Et mes B.D…. ah… mes B.D…. 45 pages franco-belges, graphic novels britano-américains, et mangas intimistes ou en V.O… Ça va être difficile. Bien que je relise très rarement les B.D., c’est une grosse partie de mon enfance et de mon adolescence. De mon adultence aussi, même si ça s’est beaucoup calmé. Je me souviens, quand j’étais petit, ma mère n’aimait pas trop les B.D.. Elle disait ne pas aimer les bulles. Elle avait aussi entendu dire que les manga, c’était écrit en très mauvais français. Ça vient peut-être de là, ma mauvaise écriture. En tout cas j’aurais du mal à revendre ça, je veux dire émotionnellement. Tout comme mon rayon littérature en ancien et moyen français, de magnifiques éditions bilingues, des fables, des contes et des chansons de geste, la légende arthurienne… Pfou la la… Non, c’est pas possible. Je garde.

Bilan de ce passage en revue : je pourrais peut-être m’économiser deux cartons sur une bonne trentaine, et gagner 25€ avec ça. Je suis bon pour faire le tour des magasins à la recherche de cartons vides chaque jour pendant les deux prochaines semaines…

Ah oui, je ne vous ai pas dit ? Quoi qu’il en soit, les cartons vont atterrir dans la maison de mes parents, dans ma vieille chambre ou au garage, pendant au minimum un an, parce que, où qu’on s’installe avec mon amie ce serait trop petit (à Lyon), ou trop loin (à Lille). Tout ça pour ça ? Oui, tout ça pour ça. Mais je ne savais vraiment pas quoi vous raconter aujourd’hui. J’ai la tête pleine de soucis. Les déménagements, vraiment, quelle plaie ! Surtout quand on ne sait pas encore où l’on vivra dans un mois. Allez. À demain.

#160 – Montpelliérien #160 – …alors que revoilà Lille, qu’on n’attendait plus, mais fait une magnifique remontée pour revenir dans la course !

Alors que la certitude de vivre à Lyon l’année prochaine était désormais fortement ancrée en nous, voilà que le spectre d’une vie à Lille refait surface. Comme une ombre plane au dessus de nos têtes, à mon amie et moi. Quand je le dis comme ça, on pourrait croire que c’est terrible, la perspective d’emménager à Lille. Il n’en est rien. Je suis sûr qu’on y trouvera notre bonheur, comme partout ailleurs. Il aurait peut-être simplement fallu que la réponse d’admissibilité de mon amie dans l’une des universités de la ville tombe une semaine plutôt, c’est-à-dire à la date qui était prévue, c’est-à-dire (bis) avant que je me rajoute sur le bail à Lyon. Je l’aurais peut-être mieux pris. Ça nous aurait évité bien des soucis administratifs. Ah, l’administration ! Rien que de le dire, j’en ai le cœur qui palpite. Attention, je ne suis pas de ceux qui crachent sur les personnes travaillant dans l’administration, mais je ne peux nier la lourdeur des systèmes eux-mêmes et le désespoir dans lequel m’ont fait tomber nombre d’entre eux lorsque j’ai eu à effectuer quelque démarche que ce soit par leur biais.

Sans compter cette saloperie d’agent immobilier qui n’a pas voulu faire un avenant pour mon inscription sur le bail à Lyon et m’a juste ajouté comme ça. Ah, c’est de l’argent économisé dites-vous ? Oui. Enfin, non. Ça fait qu’officiellement je vais être considéré comme résidant dans l’appartement de Lyon, en couple, depuis le 1er juin, alors qu’en fait ce ne sera réellement le cas qu’au 1er août. Le 1er août, c’est la date à laquelle je ne serai plus ni officiellement, ni réellement, célibataire résidant à Montpellier. Ça aurait été trop parfait. Mais non, là je vais être considéré comme ayant deux appartements en juin et en juillet, comme célibataire et en couple à la fois, sans compter que ce n’est pas la même région, donc pas la même CAF qui va s’occuper des dossiers d’aide au logement, et qu’il y aura du délai dans le transfert de mon dossier. Et allez expliquer ça à une administration. Rajoutez à ça un possible déménagement à Lille à partir du mois de septembre. Re-changement de situation, re-transfert de dossier…

Non, là, vraiment, je m’inquiète. Je me demande quelle somme dépensée dûment on va me faire rembourser. Je me demande quoi déclarer quand, pour ne pas perdre six mois d’aides nécessaires à ma survie. Je me demande où je vais vivre dans deux mois. Je me demande aussi comment je peux à ce point râler dans une pays où, même si l’administration n’est pas parfaite, j’ai au moins droit à des aides alors que je suis membre depuis si longtemps de la fédération internationale des gros·ses branleurs·ses. Bon, ça, je ne me le demande pas trop fort. Parce qu’aujourd’hui, j’ai envie de râler. Ça me fait du bien. C’est ça ou faire de la colique.

#159 – Montpelliérien #159 – Retour en bus

Voyant que le tarif et le temps de trajet étaient les mêmes en bus ou en covoiturage, j’ai opté pour un retour en bus à Montpellier. Ça en dit long sur ma prétendue sociabilité. J’aime bien écouter les gens, mais pas parce que j’y suis obligé, enfermé avec eux pendant trois heures et demie dans une cage en métal lancée à toute berzingue sur l’autoroute. Dans le bus, au moins, il est entendu que votre voisin·e n’a pas à vous faire la conversation si elle ou il n’en a pas envie, et que cela n’entraînera pas une mauvaise note, sur l’un de ces multiples sites internets où l’on vous note maintenant que vous êtes un produit comme les autres. Sur les sites de covoiturages, on vous note en tant que service mais également en tant que personne. Je ne sais pas ce que je déteste le plus. Décidément, ces derniers temps, je me concentre vraiment sur le négatif. Je dois être un peu stressé par ces déplacements et ce déménagement en cours. Heureusement, je vois fréquemment mon amie, ce qui a pour effet de m’apaiser. Si j’avais déménagé seul, je me serais peut-être déjà jeté par la fenêtre. Est-ce que je déteste plus le covoiturage ou les déménagements ? Je n’en sais rien. Misère, j’apprécie assez le jeu du qu’est-ce que tu détestes le plus, mais je n’y suis pas très bon.

Enfin, me voilà de retour à Montpellier. Arrêté à Sabines, j’ai pu constater comme cette partie de la ville où je ne vais jamais est moche. Du béton devant, du béton au milieu, du béton derrière. Vraiment, j’aime la pierre. Pourtant je suis né dans un village tout de béton et de routes en goudron. Où est-ce que je vais chercher cet amour du vieux caillou taillé ? Sans doute dans les illustrations de livres d’histoire. Dans les films. Dans la fantasy que je me plaisais à lire adolescent. Comment se fait-il que je rêve si souvent de ces ruelles japonaises dans lesquelles je n’ai jamais mis les pieds ? Les manga, les jeux vidéo. J’ai eu la chance, ces sept dernières années, de pouvoir vivre au centre ville, soit directement dans les rues les plus anciennes, Trésoriers de France, Aiguillerie, soit, comme aujourd’hui, à cinq minutes d’elles, avec vue sur le Peyrou et les Arceaux. Aurai-je la chance ça l’avenir de visiter les petites rues cozy du Japon ? Je l’espère. Entre temps il y aura Lyon, les immeubles haussmanniens et ses escaliers fabuleusements tortueux donnant sur des passages à colonnes, et le vieux Lyon à pas bien loin non plus de chez moi. J’espère ne jamais finir dans une cité de béton. Pourtant, un jour où l’autre, je le sens bien, ce sera le seul lieu où je pourrai me loger. C’est tout ce à quoi peut s’attendre un dégoûté du 35h/semaine comme moi. Ne parlons même pas de vivre au Japon. Le pays où le travail est au centre de tout. Brrr. Rien que d’en parler, ça me fait froid dans le dos.

#158 – Montpelliérien #158 – Et les tiques dans tout ça ?

Il y a du monde dans les rues. Il y a des drapeaux. Je n’aime ni trop le monde dans les rues, ni trop les drapeaux. Quel prétexte ? Non, ce n’est pas une victoire de l’union des partis nationalistes, c’est qu’il y a football. Je n’ai jamais suivi le football. C’est bien ma veine, tiens, moi qui comptais me balader un peu ce soir. Ça va être viande saoule et chauvinisme à deux balles. Pardon, à une seule balle. Vous voyez, je connais quand même les règles élémentaires de ce sport.

De quelles rues je parle ? De celles de Lyon. C’est mon dernier soir ici, avant de revenir m’y installer définitivement au mois d’août, et mon amie est déjà repartie à Montpellier. Je la rejoindrai demain seulement. Autant dire que, ce soir, je suis bloqué à l’intérieur, seul, avec une connexion wifi digne des modems 56k de la grande époque. Seul, vraiment ? Non. Il y a trois araignées au plafond. Brrr… Je les tolère. Sans elles, je pense que je n’aurais plus de sang dans les veines à l’heure qu’il est tant le plafond se recouvre vite de petits insectes volant si l’on laisse par mégarde la fenêtre ouverte après 20h. Quelle situation, hein ? Ayant peur des araignées, j’aurais tendance à les tuer malgré le fait que je me sois promis de ne pas faire de mal aux animaux, puisque, comme vous le savez peut-être, je n’achète même pas de produits d’origine animale afin de ne pas cautionner les personnes et les industries qui maltraitent les êtres vivants. Bon enfin, j’ai mangé une poutine il y a deux jours, je n’en avais encore jamais goûtée, et une pizza à midi. Il m’arrive de faiblir. Jusqu’à il y a trois ans, je mangeais encore sans appliquer mes considérations éthiques envers l’ensemble des êtres vivants. Comme je ne fais ça que par principe, il m’est difficile de ne pas craquer de temps en temps pour un plat dont le goût m’affolait à l’époque et que je vois passer devant moi. Surtout dans une période de transition comme celle-ci où je n’ai plus beaucoup de repères forts (cessation de toutes mes activités d’un coup pour cause de déménagement dans une ville complètement inconnue dans laquelle je ne connais personne, et en plus, en ce moment pour courte une période de visite seulement). C’est comme si j’avais passé cinq jours de vacances et que je m’étais dis : pense un peu à toi, laisse-toi être égoïste le temps d’un repas, concentre-toi sur le goût, le plaisir, et ne pense pas à ces pis suintant sang et pus, à ces gémissements de terreur et de douleur qui se réverbèrent dans tous les abattoirs du monde, à ce grand massacre perpétuel, orchestré pour le profit et cautionné par toi. Bon, ça n’a pas trop marché, j’y pensais en mangeant et j’y pense encore.

Bref, revenons-en aux araignées. Si je ne les tue pas, ce n’est pas parce que je les aime comme toutes les autres bestioles vivantes, car j’en ai très peur et elles me dégoûtent, c’est simplement qu’elles me sont utiles. Hors, s’il y a bien une philosophie que je déteste, c’est celle qui consiste à trier le vivant en deux catégories : utiles et nuisibles (ou non-utiles). Et à considérer qu’aux uns on ne fait pas de mal, et qu’aux autres on peut leur trouer la peau, les torturer, les exterminer à volonté. L’esprit humain est ainsi fait de contradictions. Ne me dites pas que vous n’êtes pas vous-même contradictoire sur plusieurs plans, ou venez discuter une heure ou deux et je vous promets que je saurai vous faire remarquer en quoi vous êtes un·e petit·e inconséquent·e.

Et puis, je ne tue pas les araignées parce qu’elles vont dévorer les moustiques qui me pomperaient le sang ? Qu’est-ce que c’est que cette histoire ? Est-ce que ce n’est pas une complicité de meurtre ? Est-ce que ce n’est une non assistance à insecte en danger ? Car pour trois araignées que je laisse vivre, je peux vous assurer qu’une bonne cinquantaine de petits voleteurs nocturnes ont été liquéfiés…

Ah la la. La vie… l’éthique… c’est pas facile tout ça.

#157 – Montpelliérien #157 – Montpellyonnais

À Lyon, je suis un touriste, car domicilié à Montpellier. Au 1er août, je serai un touriste à Montpellier, car domicilié à Lyon.

Cela change-t-il quoi que ce soit ? Je ne crois pas. Hier, je demandais à mon amie si elle souhaitait prendre un jour la nationalité Française, et elle m’a répondu que non. J’étais bien d’accord avec elle. C’est déjà assez embêtant de devoir répondre des bêtises du peuple auquel on a été assigné à la naissance vis-à-vis des autres peuples, mais, au moins, on peut toujours se désolidariser d’une foule en disant qu’on ne nous a rien demandé. Alors que, si c’est un choix… Elle m’a à son tour demandé si moi je souhaitais prendre la nationalité roumaine. Puisqu’elle est Tchèque. Hein ? Ah oui, elle est Tchèque mais une grande partie de sa famille est roumaine. C’est pour ça. Alors, nationalité roumaine ? Qu’est-ce que j’y gagnerai, je lui ai demandé ? Beaucoup de préjugés, m’a-t-elle répondu. Bah, non, j’ai dit, c’est déjà assez embêtant de devoir répondre des bêtises du peuple auquel on a été assigné à la naissance vis-à-vis des autres peuples, mais, au moins, on peut toujours se désolidariser d’une foule en disant qu’on ne nous a rien demandé. Alors que, si c’est un choix… Je l’avais déjà dit ? Et bien, ça ne fait pas de mal de le répéter. Je le pense réellement. Enfin, Tout cela pour dire que, Montpelliérien ou Lyonniais, cela ne changera pas grand chose.

La notion d’identité, c’est très flou pour moi. Koinkoin me disait récemment que selon lui, beaucoup de gens n’accrochaient pas à Montpellier car, la ville étant composée de beaucoup d’étudiantes et d’étudiants qui venaient et s’en allaient au bout de deux ou trois ans, aucune identité, ou personnalité, ne s’en dégageait. Pour paraphraser, Montpellier ne satisferait pas le besoin de ceux qui ressentent la nécessité d’appartenir à un groupe en se revendiquant de telle ou telle ville. Au cours du trajet de vendredi, notre conducteur de covoiturage, Lyonniais d’origine, m’a dit exactement la même chose sans que j’énonce la théorie de Koinkoin : Montpellier, contrairement à Lyon, n’avait pas une identité à laquelle il avait la sensation de pouvoir appartenir. Mince alors ! Moi qui n’aime appartenir à aucun groupe, ne serais-je pas très Montpelliérien sans le savoir ? Voilà qui me chagrinerait…

Attendez, attendez… Je ne peux pas en rester là. Il me faut trouver une issue satisfaisante à ce paradoxe qui n’en est sans doute un qu’en apparence. Il se peut que, de l’extérieur, certaines personnes trouvent mon comportement très Montpelliérien. Et après tout, après avoir vécu douze ans dans cette ville, et trente ans dans le même département, il est très possible que j’aie été influencé par un comportement répandu dans cette région du monde. Ce qui me gênerait, ce serait de me laisser aller à cette tendance qu’ont certains et certaines à se revendiquer eux- et elles-mêmes d’un certain état d’esprit régional, juste pour appartenir à un groupe, dans le but sans doute de ne pas être rejetés·es et de pouvoir à leur tour rejeter ceux et celles qui n’en font pas partie d’une manière ou d’une autre. Le fameux coup de la victime qui se transforme en bourreau, de l’enfant battu batteur d’enfants, du pédophilé pédophilant. Ce comportement semblant entraîner chauvinisme, racisme, sexisme, classisme, fascisme… bref, tous ces -ismes qui font peur, et surtout qui font chier, à sa suite. Enfin, je crois que, pour résumer, j’aime beaucoup réfléchir à nos comportements, et même à d’où vient-il qu’on les ait adoptés, mais jamais aux groupes dans lesquels ceux-ci seraient censés nous classer, ça me semble être LE piège. Voilà. Je suis à peu près satisfait de cette explication. En fait non, pas du tout, mais j’en ai assez d’écrire, alors faudra s’en contenter.

Vous ne pensiez pas passer au PMU pour l’instant philo d’entre le petit blanc et le pastis aujourd’hui, hein ? Eh bien c’est le PMU qui est venu à vous. Non, ne me remerciez pas. Offrez-moi plutôt un verre tant qu’on y est, pour moi ce sera un jus de tomates, merci.

#156 – Montpelliérien #156 – Je ne suis pas mort noyé dans le Rhône, ni dans la Saône

La cathédrale était une basilique. Celle qui surplombe la ville et à laquelle je pensais me rendre en montant à la Croix-Rousse. Que je me sens nul d’avoir confondu. C’est un peu comme si l’on confondait les martinets et les hirondelles. Enfin, je survivrai. J’ai décidé que je ne vous dirai pas son nom, à la basilique, car elle en a un. Si vous voulez savoir comment s’appelle cette basilique, vous n’avez qu’à monter là-haut vous-même. Je ne vois pas pourquoi j’aurais fait tous ces efforts pour connaître son nom et vous laisser en profiter sans que vous ne versiez la moindre goutte de sueur. Comment ça je deviens Macroniste ? Oui, vous avez peut-être raison. J’ai dû trop m’entendre dire qu’il fallait que je travaille si je voulais continuer à pouvoir vivre. Bon allez : il s’agit de Notre-Dame de Fourvière. Voilà, contents·es ? Tout ce que vous allez pouvoir faire avec cette information, pfoulala ! Il y en a qui paieraient cher pour être dans le secret, mais ces gens-là ne lisent pas le blog, tant pis pour eux.

Que vous dire d’autre ? Pas grand chose. À ma grande déception, je n’ai pas à nouveau rencontré de chienne nommée Gaïa. Ça m’aurait donné une raison de me moquer, mais je vais devoir m’en garder pour cette fois-ci. Je ne désespère pas que cela se produise avant la fin de l’année ceci dit.

Bon, écoutez, on va dire que c’est bon pour ce soir. J’ai beaucoup marché, plus d’une douzaine d’heures entre hier et aujourd’hui et je ne suis pas inspiré. Vous savez que je respire toujours, que je n’ai pas été transformé en andouillette par la mafia lyonnaise, ça devrait vous suffire. Bonne nuit.

#155 – Montpelliérien #155 – Je ne suis pas mort sur l’autoroute

C’est sur le Rhône ! que ma fenêtre ne donne pas. Mais la porte de l’immeuble est pile en face, à cinquante mètres. Bon, comme je m’y attendais, la ville est immense. Pourtant les gens tirent moins la gueule qu’à Montpellier. Moi qui pensais que le taux de tirage de gueule était proportionnel à la taille de la ville. Je me trompais.

À Montpellier, j’habitais à trente secondes du cours Gambetta. À Lyon, j’habiterai à trente secondes du cours Gambetta. Niveau dépaysement, on a vu mieux. J’ai également trouvé le Gibert Joseph, je me sens chez moi. Un pont à traverser et j’y suis. Ce que j’estime être un danger réel pour mon portefeuille, mais une promesse de ne jamais tomber à court de lectures. Dans le coin également, quartier arabe, quartier asiatique, je sens qu’on va bien bouffer pour pas trop cher. Je m’en réjouis. D’autant que le week-end, le marché de mon côté de la rive est si à peine plus cher que celui du plan Cabanes qu’on peut tellement presque pas sentir la différence.

Sinon, qu’ai-je fait ? Et ben je me suis baladé, je suis passé au marché dont je viens de vous parler, j’ai fait un peu de rangement (c’est à croire que les valises se reproduisent d’elles-mêmes dans cet appartement), changé la place des meubles afin qu’on ait assez de place pour vivre à deux dans ce studio/couloir, je suis ressorti me promener, j’ai mangé des sorbets mangue-cassis, j’ai continué ma balade et en pensant monter jusqu’à la Cathédrale qui surplombe la ville et dont j’ignore le nom, je me suis retrouvé à la Croix-Rousse, ce qui n’est pas mal non plus, puis suis rentré faire la sieste avant de ressortir me balader une petite heure. Franchement, j’ai vu tellement de places, de rues et d’endroits sympa que je serai incapable de me rappeler d’un dixième des noms de ces lieux.

J’ai croisé une jeune fille, genre hippie de technival oserai-je dire, dont la chienne s’appelait Gaïa. J’ai pensé que c’était assez cliché. Cinq minutes plus tard, je croise un groupe de punks à chien (ils n’avaient qu’un chien pour trois) mais devinez comment s’appelait l’animal ? Et oui. Bravo. Gaïa. Ça devait être l’année des G. Et on va quand même pas appeler sa chienne Gilberte ou Gertrude, faut les comprendre.

Ah oui, finalement, nous ne sommes pas morts sur la route en covoiturage. Il n’y a qu’un seul camion qui sur la voie du milieu, doublant un autre camion, à faillit nous écraser en voulant passer sur la troisième voie alors qu’on s’y trouvait. Ouf. Le conducteur était sympa. L’autre passager moins. On s’est tapé une demi-heure de discours comme quoi les femmes ne se l’avouaient pas mais voulaient être dominées, qu’elles voulaient être prises pour des connes même si elles disaient le contraire. La preuve ? Un de ses amis policier lui aurait dit que 90% des femmes qui subissent des violences de la part de leur partenaire y retournait. Alors ? Elle est pas là, la preuve ? On avait beau dire qu’on ne partageait pas son avis, le conducteur et moi, rien ne l’arrêtait. Il a tenu à continuer la démonstration en nous expliquant qu’en prenant les femmes pour des connes, comme elles le désiraient intérieurement sans oser l’avouer, il avait réussi à sortir avec une fille et sa petite sœur dans la même période, et aussi à rendre ennemies deux amies d’enfances en couchant avec les deux au cours de ses vacances dans un club fermé en Tunisie. Il s’est aussi vanté d’avoir travaillé dans toutes les plus grandes banques de France. Ah, et qu’est-ce qui faisait que Lyon était la meilleure ville de France selon lui ? Le nombre incalculable de centres commerciaux, dont, peut-être, l’un des plus grand d’Europe. C’est dommage qu’il ait ouvert sa gueule celui-là, il m’était plutôt sympathique de visage. Enfin, comme disait Katerine : « quelle importance ? Nous ne nous reverrons jamais. »

#154 – Montpelliérien #154 – Montpellier-Lyon le temps d’un week-end

Aujourd’hui, je donne ma dernière conférence sur Beethoven. Oui, oui. Celle-là même que j’ai mise des mois à préparer, et je ne l’aurais donnée que deux fois avant de quitter l’association pour cause de déménagement. Je dis des mois… pas des mois en continu. Des mois par-ci, par-là. Des mois à repousser. Quelques jours à terminer dans la précipitation. Enfin, je ne suis pas mauvais en Beethoven maintenant. Dommage que je n’en apprécie pas plus que ça la musique. Ni la personne, de ce que je crois en savoir. Peut-être que je donnerai encore cette conférence ainsi que celle sur Bach dans la ville où je m’installerai en septembre. Peut-être aussi que j’en ai marre de parler de ces compositeurs mythiques, et que j’ai plutôt envie de parler des génies inconnus, voire des pas génies du tout. Enfin, ça, moi seul peut le savoir, et honnêtement, je n’en sais trop rien. Aujourd’hui en tout cas, je sais que ce sera court. Pourquoi ? Parce qu’à 16h pétantes, l’écran me sera confisqué pour y diffuser des images de millionnaires courant sur une pelouse. Mais je me rends compte que ce n’était pas de ça que je voulais vous parler…

Ah oui, ce soir, je serai à Lyon. Un peu pour visiter l’appart dans lequel j’habiterai les premiers mois si mon amie devait être admise là-bas pour terminer ses études, mais surtout pour soutenir mon amie dans l’attente de ces résultats. On devrait savoir très bientôt. Je ne connais pas Lyon. Je vais avoir le week-end pour visiter. Je vais y prendre mon ordinateur, alors il est possible que je vous écrive quelques notes de blog depuis ce lointain pays. Attention, hein, j’ai rien promis. Croyez pas que je vais aller poser mon cul dans un mcdo juste pour avoir du wifi. Est-ce que je vais vous parler du Rhône et de la Saône ? Ce serait tellement Lyonnais. Quand on dit le Rhône, la Saône, tout le monde voit de quoi on veut parler. Quand on dit le Lez. Bof. Mais ce serait trop facile. Je vois d’ici les grandes phrases. Je contemplais le Rhône depuis mon balcon… ah non. L’appartement, n’a pas de balcon. En plus je ne sais plus s’il donne sur le Rhône ou sur la Saône. Quand je dis donne, je veux dire, que les appartement des gens dont les fenêtres sont du bon côté donnent sur l’un des deux fleuves. Notre appartement temporaire n’a qu’une fenêtre, et elle donne sur la cour intérieure. Bon, de toute façon, les grandes phrases, ce n’est pas mon truc. Oh, je vous entends vous étouffer, mais vous faites erreur. Vous confondez grandes phrases et longues phrases. Vous n’êtes décidément pas fortiches en littérature.

Ah, oui. Je vais à Lyon en covoiturage. L’idée de mourir sur l’autoroute en compagnie de trois inconnus ne m’enchante pas, mais le train c’était trop cher. C’est ça le covoiturage. Avant de monter dans la caisse, on ne peut pas savoir si les derniers mots qu’on entendra seront « t’as vu le penalty hi… » ou « j’ai voté Macron mais seulement parce que Sarkozy ne s’est pas présenté ». On verra bien. Allez, à demain. Peut-être.

#153 – Montpelliérien #153 – Prince et mon pote

J’ai vécu neuf mois en Angleterre. J’étudiais l’anglais à l’université, j’ai donc profité du fameux programme Erasmus pour voir si les bières étaient meilleures de l’autre côté de la Manche. La réponse est non. Leur cidre est meilleur, par contre. Servi à la pression et atteignant les 9°. C’était quelque chose. Aujourd’hui, si je ne bois plus, c’est parce qu’à cette époque là, justement, j’avais appris à trop boire. Je m’étais fixé un seul objectif : quoi qu’il arrive, ne pas rester avec les Français. J’ai dit que j’avais appris à trop boire là-bas… C’est vrai. Disons que j’y ai obtenu mon Master d’alcoolisme, j’avais déjà eu la Licence en France, la célèbre Licence IV. Il m’a donc été facile de tester plusieurs bars jusqu’à trouver ma famille dans l’un d’eux. Je me suis fait des potes assez rapidement. Et je me suis fait tout particulièrement deux amis. Deux qui étaient là en cas de pépin, deux à me donner rendez-vous, à répondre aux miens. Ils étaient musiciens de rue. Dans leur ville, c’était accepté, on se choisissait un coin de rue et on y jouait ce qu’on voulait, je ne sais pas si c’est encore le cas aujourd’hui. L’un touchait un peu à tout, guitare, saxophone, clarinette même il me semble, l’autre c’était guitare et voix éraillé déraillante. En parlant de toucher un peu à tout, niveau drogues aussi, ils touchaient un peu à tout. Alcool, clopes, joints, cocaïne, MDMA, kétamine… J’en oublie sans doute. Ce n’était pas mon cas, mais ça ne nous empêchait pas de bien nous marrer ensemble. Aux terrasses des bars, ou dans les rues, ou dans les cimetières quand on voulait chanter du Tom Waits jusqu’au bout de la nuit sans faire chier les voisins. Pourquoi je vous raconte ça aujourd’hui ? Parce qu’il y a quelques mois j’ai appris la mort de l’un d’eux. En trainant sur le subreddit de la ville. Dès que j’ai vu le titre, deux musiciens de rue retrouvés morts dans telle rue, j’ai eu un coup au cœur, j’ai pensé à eux. Ce n’était pas eux. C’était l’un d’entre eux. Il avait trente cinq ans. La police déclarait déjà que les causes de la mort n’étaient pas suspectes, je me doutais bien que c’était une overdose. Aujourd’hui j’en suis sûr, j’ai lu les résultats donnés à la presse par le médecin légiste. Overdose de Fentanyl.

Avant de vous parler du Fentanyl, laissez-moi vous dire que dans le même quartier, ils sont trois, entre vingt-cinq et trente-cinq ans, à être morts de la même merde en une semaine. Y a un petit dealer qui a dû prendre ses billets pour un pays lointain fissa après ça.

Le Fentanyl, c’est un opioïde synthétique, un antidouleur hautement addictif. Aux États-Unis, il a largement été distribué par les médecins. Parfois, on allait jusqu’à offrir les premières boîtes aux patients. Ça vous rappelle quelque chose ? Pour mourir d’une overdose de Fentanyl, il suffit d’en prendre 2mg. C’est 200mg pour l’héroïne. Je vous laisse réfléchir à ça. C’est de ça que Prince est mort il y a quelques mois également (et peut-être la chanteuse des Cranberries, aussi). Prince et mon pote. Un musicien des rues, un musicien des stades, tous les deux ont claqué de la même merde. Il paraîtrait que c’est une hécatombe aux États-Unis, au Canada, et maintenant en Angleterre, le Fentanyl. Prince se le faisait prescrire, mon pote se l’est fait refourguer comme ça, ou alors on en avait mélangé à autre chose et il n’a même pas su qu’il en prenait. C’est là que le statut social fait la différence.

Bref le Fentanyl c’est de la merde. Dites-le autour de vous. Ah, et si vous preniez de l’héroïne, faites encore plus gaffe qu’avant, les petits merdeux de dealers la coupent maintenant au Fentanyl sans vous le dire dans bien des régions du monde, pourquoi pas bientôt en France. C’est pas très intelligent commercialement parlant, mais bon. Allez, il se fait tard, je suis triste et fatigué. À demain.