#152 – Montpelliérien #152 – C’est bon pour le moral, enfin…

Votre humeur influence-t-elle la musique que vous écoutez ou la musique que vous écoutez influence-t-elle votre humeur ? Oh, ne répondez pas, je n’en ai pas grand chose à faire à la vérité. Je vous posais juste la question pour créer l’occasion de vous dire que chez moi ça marchait dans les deux sens. Ah, qu’ils sont détestables les gens qui vous posent des questions dans le seul but d’y répondre eux-mêmes, hein ? Je suis bien d’accord.

Selon mon humeur, donc, je suis inévitablement attiré par telle ou telle sonorité, telle ou tel artiste. C’est un fait. Il est rare que je ne me réveille pas avec un air en tête qui définira mon humeur des premières heures de la journée. Un air entendu la veille, ou un qui refait surface du tréfonds de l’enfance. Ou de l’adolescence. Qui est sans doute moins un tréfonds du coup. Du moins si l’on imagine que les fonds se superposent les uns aux autres par couches. Théorie qui n’a absolument aucun fondement scientifique. Ah la la, le langage, décidément, on ne peut pas y faire confiance. D’ailleurs, en y regardant de plus près, le tréfonds ne veut pas dire l’endroit le plus profond, mais désigne simplement les profondeurs de quelque chose. Pourquoi ce s obligatoire à tréfonds ? Je n’en sais rien, demandez à un linguiste. Quant à savoir si l’on peut réellement parler d’un tréfonds… Bon, ça suffit comme ça. On peut reprendre ? Reprenons.

Ce qui m’embête le plus, c’est l’influence énorme qu’a la musique que je suis en train d’écouter sur mon humeur du moment. Par exemple, aujourd’hui, j’ai rempli la carte SD de mon téléphone de toute la musique que je pouvais y faire rentrer. Et je peux en faire entrer énormément, mais malheureusement pas tout ce que je possède. Il m’a donc fallu effectuer un tri. Ce qui m’a poussé à ré-écouter quelques extraits d’albums que j’affectionnais par le passé, pour ne pas prendre de la place pour rien. J’ai également voulu y inclure de la musique à découvrir, que je ne connaissais pas. Mais je me suis quand même permis d’effectuer une brève écoute de certains morceaux, au hasard, pour être certain que telle ou telle œuvre me convenait à peu près.

Et ce fut les montagnes russes émotionnelles.

J’ai d’abord fouiné du côté de 山崎ハコ (Yamasaki Hako —si vous avez lu le post sur les noms japonais vous savez donc que Yamasaki c’est le nom de famille, et Hako le prénom, oui sauf que c’est un nom d’artiste, son vrai nom c’est 安田初子 (Yamada [nom] Hatsuko [prénom]), oui sauf que Yamasaki c’est son nom de jeune fille, et démerdez-vous avec ça—), autrice-compositrice folk-blues-jazz-trad (je déteste étiqueter mais je le fais, je suis comme ça, plein de contradictions) qui a débuté sa carrière en 1975 et me fait l’effet d’une Françoise Hardy à ses débuts, a ses avantages : je n’ai pas à me soucier des paroles, car je ne cause pas assez bien japonais pour les comprendre en l’écoutant distraitement, et je peux me concentrer sur sa jolie voix. Et ses inconvénients : c’est dépressif à souhait et à partir des années 80, eh ben… on sent bien les années 80 et les instrumentations au synthé-cheap. Pouvez écouter l’album 飛・び・ま・す pour vous faire votre avis sur la question. Moi, je ne suis toujours pas décidé, c’est un jour j’aime, un jour j’aime pas. Par contre tous les jours ça me déprime profondément, c’est bien pour ça que je ne l’écoute pas tous les jours. Voire, je ne l’écoute quasiment jamais. C’est pour ça que je connais très mal.

Ensuite, j’ai intégré deux albums communs et live, dont je me souvenais mal, de Звонко Богдан (Zvonko Bogdan) et de Јаника Балаж (Janika Balaž [prononcez Yanika Balaj —oui, je sais—]) avec son orchestre de tambura. Ces deux-là sont du nord de la Serbie, de la province de Voïvodine, et leurs petites chansons me donnent envie de boire un verre de vin, allongé au soleil sur une pelouse bien verte, entouré d’amis et les pieds trempant dans le Danube. Écoutez les chansons Već odavno spremam svog mrkova ou Moja mala nema mane pour voir si je rigole.

Ensuite, j’ai bourré la machine de la totalité des œuvres pour clavecin de Jean-Philippe Rameau (Jean-Phil Hmm, non là ça devrait aller) jouées par Scott Ross, ainsi que les œuvres, pour le même instrument de (Joseph-Nicolas-)Pancrace Royer, jouées par Yago Mahùgo. J’ai poudré ma perruque et me suis dessiné une mouche avant de headbanger comme une malade au son des Cyclopes ou du Vertigo. Ces albums, je les connais très bien, mais je ne peux jamais m’empêcher d’écouter ces deux tubes-là quand je les survole du curseur de ma souris.

Pour finir, et puisque j’en étais au headbanging (dans mon texte, dans les faits j’en étais à nouveau à la dépression folk-jazz japonaise de 浅川マキ [Asakawa Maki], mais je n’arrive pas trop à accrocher alors je n’en ai finalement gardé aucun album), je suis allé rejoindre Koinkoin au Broc Café, en face du jardin des plantes *aTCHAAAA* juste après avoir terminé de transférer mes albums préférés de Motörhead sur ce petit téléphone de marque chinoise mais devenu réceptacle des cultures musicales du monde. Pour les curieux, ces albums sont Overkill, Ace of Spades, 1916 et Bastards.

Bref, de la dépression à la douceur de vivre, en passant par l’excitant tic tac des machines à coudre antiques et la fureur libératrice du gros métal qui tache, j’ai subi les influences de toutes ces musiques sur mon moral, et j’ai l’impression d’avoir couru un marathon. Donc, je vais maintenant me reposer en écoutant les voitures qui passent sous ma fenêtre.