#130 – Montpelliérien #130 – Un Truc sur le Verdanson

Le Verdanson n’est pas à sec ! Fait assez rare pour le noter. Un écriveur écrit : « fait assez rare pour le noter », fait bien trop banal pour le noter dans quelque annale que ce soit. Mais voilà que ce dernier fait lui-même remarquer que cette tournure est par trop employée ! Fait assez rare pour le noter.

Le Verdanson n’est pas à sec, donc, j’ai pu le constater hier soir en passant par l’allée Hermantaire Truc. Je dis pas truc comme j’aurais dit chose, remarquez la majuscule. Truc c’était son nom, à Hermentaire (avec un e). Qui était-il ? Facile, pour le savoir, cherchons à Truc dans le dictionnaire des noms propres. On ne trouve rien. Mince. Et sur Wikipédia ? On ne retrouve re-rien. Re-mince. Ne vous inquiétez pas, je fais durer le suspense, mais vous saurez bientôt qui était ce Truc. En attendant, revenons-en au Verdanson.

Le Verdanson est un petit cours d’eau qui traverse Montpellier et va se jeter dans le Lez, un autre cours d’eau, moins petit, qui traverse Montpellier et va, lui, se jeter dans la Méditerranée au niveau de Palavas-les-Flots. Le Lez est donc un fleuve, et le Verdanson en est un affluent. Ça vous rappelle des notions de géographie ou vous dormiez trop bien près du radiateur au collège ? Bon, continuons. En quoi le Verdanson est-il remarquable ? Il l’est tout d’abord parce que, comme le bit, il ne connait que deux états : 0 – à sec ; 1 – en crue. Mince, je me contredis, j’ai dit qu’hier il n’était pas à sec ! Or il n’était pas en crue non plus… Oui, mais si vous lisiez mieux vous auriez remarqué que j’ai également dit que c’était un fait notable. Mauvaises langues. Hier, il était donc dans l’état 0.05.

Photo par Gwlad (galerie du Triangle)

Quoi d’autre concernant le Verdanson ? Et bien son lit est entièrement de béton. De sa source jusqu’à l’endroit où il se jette dans le Lez, au moulin de Salicate (quartier les Aubes). Une vraie chance pour les graffeurs·ses que la municipalité laissent s’y amuser autant qu’ils et elles le veulent. Après tout, autant recouvrir toute cette laide grisaille de jolis dessins, ça ne peut pas faire de mal. Pas faire de mal sauf précisément là où il se jette dans le Lez. Là c’est un dépotoir. Les bombes de peinture, presque vides mais pas totalement, et autres déchets sont abandonnés sur place et font crever les bestioles du coin. Message perso aux artistes : essayez de faire du beau jusqu’au bout, toute cette merde me gâche un peu le goût de vos œuvres. Bon, mais à part ça, le Verdanson se trouve du coup être la plus grande galerie d’art de la ville, gratuite, et à ciel ouvert.

En parlant de merde, et pour finir, on est bien obligé de le dire : le Verdanson ne s’est pas toujours appelé comme ça. Au départ, c’était le Merdançon. À cause de l’odeur. C’était là que toute la ville balançait ses eaux usées, même les artisans, genre tanneurs et autres. Les tanneurs ça pue. On le sait moins aujourd’hui que ce ne sont justement plus de petits artisans de centres-villes, mais je vous le dis, ça pue. Bon et puis un jour quelqu’un a dû se dire que ça n’était pas très glorieux une ville traversée par le Merdançon, et on l’a changé en Verdanson. Il est intéressant de constater que souvent les gens voulant faire de l’humour et ne connaissant pas l’histoire changent intuitivement le V en M et partent d’un bon rire gras. Alors je fais semblant de rire et je leur raconte l’origine de ce nom, car j’adore briller en société en étalant mes connaissances sur les noms liés à la matière fécale.

Et Hermentaire Truc dans tout ça ? Je ne sais toujours pas si je préfère le fait que son nom soit Truc ou son prénom Hermentaire en réalité. Je crois que si j’ai un fils un jour je l’appellerai Hermentaire. Hum, je ne m’en sors pas de ces digressions. Il faut que j’avance. Hermentaire a donc une allée à son nom, une allée toute minuscule, verte, avec des bancs, sinueuse, cachée entre deux immeubles anciens, et qui passe au dessus du Verdanson. L’allée rêvée. Elle se situe quelque part entre l’arrêt de tramway Albert 1er et l’arrêt Philippidès. Et, quelle chance nous avons ! il y a dans cette petite allée, en plus des arbres, des bancs et du Verdanson qui passe en dessous, une plaque nous expliquant qui est Hermentaire Truc ! Alors ? Elle est pas belle la vie ? Elle est presque belle. Comme je le faisais remarquer au début de l’article, on a orthographié Hermantaire avec un a sur sa plaque, or sur les livres publiés par lui, on trouve systématiquement Hermentaire avec un e. Pour une fois qu’on causait de lui, c’est bien dommage…