#374 – Des dents jaunes au bluetooth il n’y a qu’un pas

Nous sommes le 10 mai. Je fais des bêtises. J’achète des claviers bluetooth pour pouvoir écrire sur ma tablette depuis n’importe quelle terrasse de café, n’importe quel banc de parc. C’est pas des bêtises vous dites ? Si que c’en est. Tout ça parce que j’ai arrêté de fumer. Je ne vous avais pas dit que j’avais repris ? Ben voilà. J’avais repris, j’ai rarrêté.

Tiré de l’exposition de rue du Fandax Collective

Rarrêté, tout à fait. J’avais repris car, n’ayant plus de quoi calmer les angoisses par la fumée, j’avais repicolé. Une ou deux fois seulement, dont une contre mon gré pour faire plaisir à quelqu’un, mais ça ne m’avait pas fait du bien. Alors bon. Je m’étais dit qu’il valait mieux fumer, l’alcool est vraiment un poison trop puissant pour moi. Maintenant je vais tenter de ne retomber ni dans l’un ni dans l’autre de ces modes de fuite durant au moins un mois ou deux. Pfou, c’est long un mois. Déjà qu’une journée c’est long quand on ne boit ni ne fume pas… Une journée sobre, c’est sans fin. On se rend pas compte, essayez un jour vous verrez.

Tiré de l’exposition de rue du Fandax Collective

Enfin bon. Il me faut trouver un nouveau travail au plus tôt. Je commence à en avoir vraiment ma claque de trier des bries par date de péremption dans des frigos trop froids, alors je dois une fois encore faire les efforts nécessaires pour récupérer tout mon cerveau, au moins momentanément.

Tiré de l’exposition de rue du Fandax Collective

C’est mon jour de repos, et je fais n’importe quoi, donc. J’ai dépensé presque cent euros en une journée. Un clavier, une salade au resto, deux cafés, un thé glacé maison, un cookie, un bouquin dont j’ai parlé à un ami il y a deux jours et que j’ai trouvé par hasard dans une bouquinerie aujourd’hui, un ramune pêche à l’épicerie japonaise, boulevard Anspach je crois, ou rue du Midi je sais pas je me paume toujours dans ce coin. Cinq balles la limonade mais la bouteille est belle et puis merde faut que je me fasse plaisir un peu pour compenser l’arrêt d’afflux artificiel d’endorphines que je me tapais en continu depuis des mois dès que je sortais du taf par la magie des pétards. Toutes les factures sont payées et le loyer aussi, mais il doit me rester à peine deux cent euros pour vingt-et-un jours à tenir maintenant. Heureusement que je me nourris uniquement des produits périmés du supermarché dans lequel je bosse, je vous le dis. Ça va me faire drôle quand je vais quitter ce taf et que je devrais recommencer à faire mes courses comme tout le monde.

Tiré de l’exposition de rue du Fandax Collective

J’aimerais donc vous prendre une photo de moi devant ma tablette, mon clavier bluetooth, mon café et mon cookie, à cette terrasse installée dans une cozy cour intérieure du quartier des boutiques semi-chics, au départ de Louise. J’aimerais, mais si je prends une photo en plus de tout ça, je crains un effondrement cosmique par un trop brutal bouleversement du ratio schlagions/hipsterions dans l’univers.

Tiré de l’exposition de rue du Fandax Collective

Qui a l’œil affiné voit d’ailleurs très bien que je ne suis pas véritablement un hipster. Je suis rasé. Eh oui, ça arrive. Mes chaussures sont défoncées car je n’en ai que deux paires dont une réservée au travail, les lacets ne sont pas de la même couleur car je n’avais rien d’autre sous la main quand l’un d’eux a cassé. Mon sweat-shirt est bouffé aux manches, aux poches et à l’encolure, pas par les mites mais par les années, car je le porte depuis bientôt dix ans. Il était noir, il est maintenant de ce gris rougeâtre des trucs noirs qu’ont trop pris le soleil. Le pantalon que je porte est trop court car il a rétréci à la laverie, les deux autres sont sales… Bref. Ça ressemble à un hipster, ça va dans les lieux de hipster, mais c’est du Canada Dry. Les moins de trente ans auront pas la réf, tant pis.

Tiré de l’exposition de rue du Fandax Collective

Je fais des bêtises, mais je n’ai pas trop le choix. Des deux vrais amis que je me suis fait ici, l’une a déménagé hors de Bruxelles, l’autre a onze ans de moins que moi et si on passe de bons moments à tchatcher on ne va pas non plus passer toutes nos journées ensemble, alors… je me fais chier. Je me promène dans de jolies rues, je pense à des trucs, mais personne avec qui partager tout ça. L’idée d’écrire, pour le blog, pour moi-même, en sirotant un café par jours de grand soleil, est la seule qui me donne un peu envie. Je n’aime plus écrire sur papier, mais je ne veux pas rester enfermé dans mon appart pourri pour taper à l’ordi.

Tiré de l’exposition de rue du Fandax Collective

Je veux des gens autour de moi, je ne veux pas avoir à picoler dans un bar pour me faire de nouveaux potes même si c’est une technique qui marche ici. Alors de toutes les bêtises que je peux faire, écrire en buvant des cafés, entouré de gens qui vivent leur vie, c’est sans doute pas pire. J’ai le cadre qui me fait plaisir, et je suis concentré sur ce que j’ai à raconter. Voilà qui m’occupe presque sainement.

Enfin, vu le fric que j’ai lâché aujourd’hui, faudra quand même penser à aller plus souvent au parc qu’au café.

#319 – L’art, ce n’est pas une science exacte

Aujourd’hui, alors que je marchais paisiblement, un doute violent m’assaillit. Quel nom donne-t-on déjà à l’art des hommes préhistoriques ?

Je ne me souvenais plus. L’art rupestre ? C’est ça ? Peut-être bien. Mais l’art rupestre ce n’est pas celui qu’on fait tranquillement installé à la campagne ? Non, ça c’est l’art champêtre. L’art champêtre, ne cherchez pas, ça n’existe pas. Pas plus qu’il n’y a de gardes rupestres.

Garde champêtre, c’est un joli nom. En vérité cela veut dire policier. Ce qui est moins bien connoté de nos jours. Il ne faut donc pas le confondre avec le garde forestier. Garde champêtre, en France, c’est policier de la police rurale. Qui n’est pas la même chose que la police municipale. On devrait sans doute appeler les policiers municipaux des gardes villageois, et ceux de la police nationale des gardes intervilles, ce qui rappellerait cette vieille émission rigolote qui rythmait nos étés d’enfance. Enfin bon, monsieur le ministre de la justice française, si vous trouvez la police par trop mal aimée, c’est une idée.

Mais revenons à l’art préhistorique. Alors que je marchais toujours, le terme art pariétal fit un joli pop quelque part dans mon cerveau. L’art pariétal, oui. Ce doit être ça. Ou est-ce autre chose ? L’art pariétal ne serait-il pas le pendant masculin de l’art marital ? Non impossible, le mariage n’est pas un art mais une erreur. Ce doit donc bien être ça, l’art pariétal.

Aussi tôt rentré de ma promenade, je lance une recherche wikipédia. Et voilà donc le fin mot de l’histoire :

L’art sur bloc restera par contre à jamais un mystère.

Vous vous demandez maintenant ce qui a déclenché cette réflexion, et c’est bien normal. Pardon ? Si, faites-moi confiance, vous vous le demandez. Peut-être sans même vous en rendre compte. Et, dans tous les cas, si vous ne vous le demandiez pas, vous vous le seriez demandé dans quelques heures, ça ne fait aucun doute.

Eh bien voilà. Cette question m’est venue car je me demandais comment qualifier cette œuvre :

Magnifique n’est-ce pas ? Ce n’est pas une blague, j’aime beaucoup cette peinture. J’aime croire qu’il s’agit de renards. Renards roux. Animaux présents à Bruxelles. Certains les trouvent envahissants, d’autres adorables. Vous pourrez d’ailleurs tomber, à différents endroits de la ville, sur des renards peints par l’artiste Rose Delhaye, assortis de la phrase : « je ne suis pas un nuisible. »

Personnellement, j’irais pas les caresser mais enfin, ils ont le droit de vivre comme nous et, pour ma part, même en me promenant tard, je n’en ai encore jamais croisé.

Mais cette peinture-ci, art rupestre ou pariétal ? Pensez-vous que je sois allé me promener dans une grotte ? Non. Car j’ai peur des araignées. Voici donc cette peinture dans son environnement naturel :

XXV est-il le nom de l’artiste ? Nous ne le saurons pas.

Art rupestre donc.

Enfin… Le béton, ça compte pour de la roche ?