#411 – Capturer la lumière même quand il n’y en a pas

Ces derniers temps, j’évite de rester devant mon ordinateur. Problèmes de dos, problèmes de à quoi bon faire des choses en ligne. À la fois le besoin et l’envie d’aller faire des tours dehors. Alors pour occuper mes balades j’ai commencé à prendre des photos. Avec mon téléphone. Faut pas pousser.

Je prends surtout des photos de vieux bâtiments, de rues étroites, d’oiseaux et de végétation. À Bruxelles, ce n’est pas toujours facile, car pour faire de la photo, il faut de la lumière.

Enfin, quand le temps est trop moche, je passe la photo en noir et blanc, et en général ça fait l’affaire.

#393 – Ça tombe bien

On est dimanche, et le dimanche Gwlad met sa tombe à jour. Son blog pardon. Blog sur lequel vous pouvez aller admirer les tombes du monde, les monstres de musée, les écorchés, les animaux morts envitrinés ou pas, les ciels pluvieux, les fruits pourris et les fleurs fanées.

Où qu’il est le blog ? Ici : https://sasgwlad.wordpress.com/

Photo de Gwlad tirée de l’article Musée d’histoire naturelle de Lille

Évidemment je m’amuse à vous lister tout ce qui fait fuir le commun des mortels dans les travaux de Gwlad, mais je vous promets que ça vaut le coup d’œil. Si je voulais être très précis, je devrais dire que sur la partie blog du site vous pourrez surtout admirer des plages, des campagnes, du béton sur lequel la nature a repris ses droits, et toute sorte d’endroits insolites ou investis par l’art. Vous n’aurez même pas à aller sur Wikipédia pour en savoir plus, puisque en véritable guide touristique notre photo reporter assortit les images d’une petite plaquette présentatoire. En français et en anglais ! Oui, m’sieurs-dames.

Photo de Gwlad tirée de l’article Cimetières de bateaux

Sur la partie photo du site, vous pourrez voir le penchant plus ouvertement artistique de notre amie.

Gwlad, elle a ce truc de l’image depuis toujours. Enfin depuis 17 ans que je la connais au moins. Une espèce d’énorme intuition esthétique qui me souffle. Elle aime les lumières et les couleurs dans la nuit, les vitres et les reflets, les superpositions de plans transparents. Quelque chose me dit qu’à 7 ans elle avait déjà internalisé Wong Kar-wai et tout le cinéma américain et asiatique des années 70 à 90. Surtout ceux dans lesquels il pleut et c’est la nuit. Maintenant elle se trimballe avec son appareil photo et elle prend des clichés inédits de lieux et d’ambiances qui existent depuis toujours dans les rêves. C’est un peu comme ça que je le ressens. Ses photos me replongent très souvent dans des sensations proches de ce que je pouvais ressentir des éclairages et de l’obscurité quand j’étais enfant. Ces sensations étaient très fortes à l’époque, elles se sont estompées avec les années, mais elles sont souvent ravivées par l’art. Dont les photos de Gwlad.

Photo de Gwlad tiré de sa série The Red Shoes

Tout ça c’est mon ressenti perso, bien sûr. Je suis certain que vous trouverez des aspects différents de son œuvre qui vous toucheront car son travail est plus diversifié que je ne le laisse entendre dans un si court article. Allez donc voir ça par vous-même.

Ah oui, je disais que le dimanche Gwlad mettait son blog à jour, c’est du moins ce qu’elle a dit qu’elle ferait. N’hésitez pas à aller lui mettre un coup de pression, il est déjà quinze heures et toujours rien. C’est pas sérieux tout ça.

#387 – Norge, on te sonne

Norge est un poète Belge. Je dis est… Était.

Depuis que j’ai acheté une anthologie de ses textes, Poésies (1923-1988) chez Gallimard, il ne se passe pas deux semaines sans que j’aille en lire quelques pages, sans que je sois ébloui par son humour autant que par son style. Avez-vous déjà ressenti ça ? Lisant quelques pages d’un auteur, vous vous rendez immédiatement compte qu’il s’agit d’un lointain cousin que personne dans la famille ne vous avait présenté ? Les veaux. Parce que c’est ce que je ressens dès que je lis Norge. C’est le cousin inconnu, et celui qui a réussi, avec ça. Pas la réussite qui écrase tous ceux qui viennent après lui, non, la réussite qui inspire. Celle qui montre aux petits jeunes qu’ils peuvent faire quelque chose de beau et de pas prétentieux, avec un peu d’encre et du papier.

Norge est mort, mais trop récemment. Je ne peux pas, légalement, vous partager ses œuvres ici. Pas encore tombées dans le domaine public. Ce n’est qu’à l’âge de nonante-deux ans, en 1990, qu’il a claboté. Il aurait pu se presser un peu, car si aujourd’hui ses ayants droits ne font pas un tapage à la Hergé, et que ses textes ne circulent pas librement, j’ai bien peur que d’ici cinquante ans il soit oublié de tous. Dans mon entourage direct, il ne se trouve pas une seule personne de moins de trente ans qui connaisse son nom ni le moindre de ses poèmes. Ça me rend triste.

Alors voilà. Je vais faire une petite entorse à la légalité. Une seule. Il y a quelques mois, j’ai enregistré l’un de ses textes sur une petite piste instrumentale de mon cru dont je ne savais que faire. C’était en décembre je crois. Entre un moment où je me trouvais très mal et une période où je n’allais pas me sentir bien du tout. Durant cette éclaircie de quelques jours, m’étant remis à la musique, je cherchais ce que je pourrais bien raconter dans mon micro nouvellement acquis. J’ai ouvert mon recueil de poèmes de Norge, et le premier texte sur lequel j’ai posé les yeux était : On sonne. Je me souviens avoir fait ça en quelques minutes, avoir trouvé que l’ambiance convenait bien à ce texte, qui est l’un de mes préférés d’ailleurs, et m’être dit que je le retravaillerai plus tard avant de l’oublier au fond d’un tiroir.

Je ne le retravaillerai pas. Je n’ai rien mixé, il n’y a aucun travail du son effectué sur la voix, j’ai enregistré et c’est resté tel quel, brut, depuis six mois. C’est trop tard maintenant. Je ne me sens pas la force de revisiter tout ça. Je viens de le réécouter une fois. De la voix à la guitare, tout me fait grincer des dents. Je me contenterai donc de déposer cette chose ici et de ne plus jamais la réécouter. Ce qui compte, c’est que ce sont les mots de Norge. Ça vous donnera peut-être envie de lire davantage de ce qu’a écrit ce monsieur. Si ce n’est pas le cas, dites-vous que c’est ce montage audio qui n’y fait pas honneur, et lisez-le quand même.

Ah oui, dernière chose. Qu’on m’excuse d’avoir ajouté un s à chiens-et-chat, je ne m’en suis rendu compte qu’après avoir enregistré, je recommence pas tout pour un s. Fainéant un jour… Qu’on m’excuse également, à moi comme à tous les gens originaires du sud de la France, de ne faire absolument aucune distinction entre les différents sons « o ». Nous ne les entendons tout simplement pas. Jusqu’à ce que nous rencontrions un Parisien, en général c’est un Parisien, qui nous le fasse remarquer en se moquant bien, nous n’avons pas conscience que cette diversité de « o » existe. Ensuite on est au courant, mais on n’entend toujours pas la différence. Je sais que ça choque l’oreille de beaucoup de francophones. Soyez donc gentils, et concentrez-vous sur mes autres défauts de diction.

Voici donc :

ON SONNE

Cher univers, tu m’étonnes.
Tu dis blanc, mais tu dis noir.
Excuse-moi, car on sonne.
Oui, j’y cours, oui, j’y vais voir.

Me revoici, que disais-je ?
Ah oui : je comprends bien mal
Ton feu froid, ta chaude neige
Et tes trois règnes en al.

Pardon, mais l’on sonne encore.
Une seconde ! J’arrive.
(Elle insiste, la pécore.)
Attends-moi, tiens prends ce livre.

Ouf ! tu répondais, je crois
Que l’habitant de la lune…
Je parlais de croix, de croix ;
Ah oui, tu parlais de prune.

Je ripostais cependant…
Tonnerre, encor la sonnette !
Je disais : le mal aux dents…
Non, je disais : l’alouette…

Ces escaliers me tueront.
Tu réponds : ta voie lactée,
Tes soleils et tes nuitées,
Que tout ça tourne assez rond.

Bien, bon, c’est joli à voir,
Mais pour nous, c’est du spectacle
Si tu crois nous émouvoir,
Nous renâclons, je renâcle !

Je te parle chien et chat,
Je te parle messieurs-dames,
Vie et mort, amour, crachat,
Je te parle corps et âme.

Tudieu, la sonnette encore.
Qui sonne ? La mer, l’azur,
Les siècles, Nise, un centaure ?
Mais on sonne, c’est bien sûr.

On sonne, on sonne, on re-sonne.
Univers, excuse-moi.
Tu disais : chaud, je dis : froid !
J’ouvre et je ne vois personne.

#375 – Je ne supprimerai pas mes notes de blog. Enfin faut voir.

Si vous avez commencé à touchotter à quelque discipline artistique en même temps qu’internet est apparu par chez vous, et que vous n’avez pas lu I will not delete my games de Sweetfish, allez-y. Sûr qu’une part de vous s’y reconnaîtra.

J’ai fait mes premiers dessins à la maison, auprès de ma maman, qui loin de se soucier de la qualité de ma production souhaitait simplement que je passe un bon moment. Puis j’ai continué à l’école maternelle. Avec un faux départ tout de même. Quand ma mère a su que je m’étais fait durement réprimandé pour avoir dépassé en coloriant le loup en gris, elle m’en a retiré jusqu’à l’année suivante. La maîtresse détestait les enfants. Sur la dizaine de jours que j’ai dû passer dans cette classe, j’ai pu assister à la fessée cul nul debout sur une table et devant toute la classe d’un camarade avec un retard mental, parce qu’il avait fait caca dans la classe. Ah, la bonne époque.

Plus tard, avec les copains, à l’école primaire, on s’enregistrait. Soit improvisant des chansons, soit des sketchs « comiques » sur des cassettes, sur les chaînes hi-fi de nos parents, avec des micro de karaoké dénichés en brocante j’imagine.

Bon et puis il y a eu les premiers poèmes de pré-adolescence, les petites chansons fades, les trois accords de guitare…

Tout cela ne s’est jamais retrouvé sur internet. Et j’en suis fort heureux voyez-vous, que des millions de personnes ne nous aient pas entendus, ou pire vus, chanter « Mario, il court, il saute, il fait des flips à l’envers. » Notre scolarité n’en aurait pas été facilitée. Si la cassette est sans doute encore au fond d’un tiroir ou d’une malle, chez l’un de nos parents, la bande magnétique doit être collée et irrécupérable. Et si je suis soulagé que ce n’ait jamais été diffusé au grand public, j’avoue trouver un peu dommage que tout cela n’existe plus que dans mes souvenirs.

Internet n’est arrivé qu’en 1998-99 pour moi, quand mon frère nous a légué son ordinateur et son modem à la fin de son stage chez IBM à Montpellier. J’avais 11 ans. Je m’en servais alors uniquement pour télécharger et imprimer des images Dragon Ball ou South Park, en les cherchant sur Copernic. Ensuite, c’est devenu ma source des paroles de musiques anglophones auxquelles je ne pigeais pas grand chose. J’imprimais tout Eminem, The Offspring, Korn, Metallica… (si je dis Blink-182 et Sum 41 je devrais effacer cet article plus tôt que prévu alors excusez-moi de ne pas les mentionner)

CD-ROM trouvé hier dans la rue. Heureux hasard !

Ce n’est qu’en 2006, que j’ai commencé à mettre ce que je faisais sur internet, si l’on ne compte pas ce que je partageais directement avec les amis sur AIM ou MSN. Les blogs, MySpace et le tout début de Facebook faisaient qu’un utilisateur cazu qui n’y connaissait encore rien en programmation ou en méthodes d’hébergement pouvait désormais facilement publier en ligne et gratuitement.

Que reste-t-il de mes chefs-d’œuvre de la période 2006-2022, en ligne, sur CD ou disque-dur ? Pour ce qui est des dessins, je dirais 80%, pour le textes sans doute 40%, pour la musique pas loin de 100%. Les textes en disent long sur ce que vous pensez, et j’ai toujours honte de ce que je pense. C’est donc ce que j’ai le plus effacé. Voyez, je suis en général assez convaincu de ce que je pense, mais cette conviction ne perdure qu’une minute ou deux après que ma pensée s’est manifestée par l’entremise de mes cordes vocales, et avec le soutien non-négligeable de mes dents, ma langue et mon palais. Une fine équipe qui ne manque jamais une occasion de me mettre dans l’embarras.

Les dessins et les morceaux de musique, s’ils ne sont pas associés au texte, me gardent au moins de cette honte. Honte de penser mal ou de dire mal ce qu’on pense bien. Ils me font simplement honte de n’avoir pas assez travaillé, ou d’avoir des goûts très discutables.

Il y a donc tout à parier que je ferai, un jour ou l’autre, disparaître ce blog d’internet. Mais effacerai-je tout, même mes backups ? Pour moi qui ai si mauvaise mémoire, ne serait-il pas utile de conserver quelques notes, pour me souvenir, à l’occasion d’une relecture, des évènements que j’aurais traversés quelques années auparavant ? Des personnes que j’aurais rencontrées ? Sans doute que si. Ce serait utile. J’oublie trop vite trop de choses. Il me faut des aide-mémoire.

#372 – Je suis dans la place

Voilà. Je suis dans la place. Je viens d’installer une image créée il y a quelque mois, imprimée et plastifiée, quelque part en ville. C’est une image de ce même endroit, stylisé, et dans laquelle j’ai rajouté un personnage tiré d’un photostock libre de droits.

Ça faisait un moment que j’avais envie de participer au paysage de la ville. De décorer un peu les lieux que je trouve très sympa. Sans colle ni trucs qui abîment, juste accrocher des trucs démontables facilement. Jusque là, j’en avais rien fait, mais ça y est. Je dois avoir retrouvé le niveau d’angoisse adéquat pour avoir besoin de recréer des trucs et des machins. Une musique ici, un dessin là…

Mon ami Feldo parle de ça dans sa dernière note de blog. En ce qui concerne ma personne, la réponse est claire. Oui, il me faut souffrir pour créer des machins. Plus précisément, il me faut avoir à fuir une souffrance, une angoisse. Il me faut avoir cette impression que fabriquer quoi que ce soit me permettra de me noyer dans cette activité avec assez d’intensité pour que j’oublie la vie qui m’effraie, me dépasse, m’écrase. C’est inconscient, en général je m’en rends compte qu’après coup.

C’est la même chose qui m’a un temps fait me tourner vers l’alcool, c’est la même chose qui me pousse à fumer plus de pétards que de raison. Sauf que là, il y a la notion supplémentaire de combat. Boire ou fumer, c’est fuir, fabriquer quelque chose, c’est fuir aussi, mais c’est mettre une petite gifle à la vie au passage, pour se faire croire à soi-même et aux copains qu’elle est pas si terrible, qu’on peut y ternir tête. Avec fantaisie et en se marrant si possible, pour bien bien oublier l’horreur de l’existence physique.

Quand j’étais en couple, j’étais tellement bien que je n’avais besoin de rien créer. Je n’avais besoin de rien tout court, sauf d’elle et de ses sourires. Je ne manquais de rien, pourquoi faire quoi que ce soit ? Les moments où j’ai fait des machins étaient toujours des périodes de stress intense. Déménagements, recherche de travail… Les moments où l’angoisse était si grande que même en couple, je me sentais tout seul à affronter ces épreuves.

Il y a aussi une notion d’orgueil dans tout ça. L’impression de n’avoir jamais rien apporté de bien, d’assez bien pour que… disons une œuvre, puisque c’est le mot, apporte ce soulagement à d’autres que moi seul, et si possible pour une durée plus longue que le temps de la découverte. Le genre de trucs qui vous crée un petit bouton quelque part dans le cerveau sur lequel vous pouvez appuyer quand vous avez besoin de votre shot d’endorphine tout au long de la vie.

Je culpabilise tellement d’exister, que je voudrais m’assurer de procurer plus de plaisir que de douleur aux autres êtres qui souffrent dans mes environs. Essayer de faire des trucs m’aide au moins à croire que je bosse dans ce sens, que j’ai pas tout à fait laissé tomber les autres en baissant définitivement les bras, tout en restant le gros égoïste que je suis au fond. Dans les moments de grosses crises existentielles, donc, pour ne pas me vivre comme un encombrant, je suis poussé à créer.

D’où que ça vienne, ce n’est pas un lieu très cool. Par contre, ça marche. Ça permet de se créer un petit horizon artificiel, de divertir deux trois personnes au passage. Pendant toute la durée d’un projet en cours, je me lève avec le sourire le matin, même si j’ai mal dormi. Je m’enthousiasme pour tel ou tel aspect du monde, j’imagine des rencontres, des avenirs possibles.

Bref. Je suis dans la place, j’ai fait mon petit truc par une matinée ensoleillée. Dans le coin près de chez moi que je préfère. J’imagine les gens qui vont se demander ce que c’est, qui c’est ce mec sur l’image, qui a fait ça, pourquoi. Et j’en suis tout content. Faudra voir combien de temps ça reste accroché. Pas mal de vent aujourd’hui, et mon installation n’est pas très solide.

Me reste plus donc qu’à trouver un truc qui me tienne l’après-midi pour ne pas avoir le temps de penser que demain je retourne bosser au supermarché.

Musicouillerie #010 – À propos des Pupi (et sa version piano)

Et voilà ! C’est enregistré, mixé, masterisé.

Contrairement à mes habitudes, je vous laisse découvrir le morceau tranquillou et j’en discute ensuite. Enfin, les morceaux. Prenez votre temps.

À propos des Pupi

Composé sur un air original de Alexandre ASTIER pour la série Kaamelott.

Guitare classique, guitare portugaise : Michele BONI
Percussions : Maciej GIŻEJEWSKI
Contrebasse : Kentaro SUZUKI
Mix et mastering : Francesco MONTRONE pour InABagRecords
Composition : Alexandre ASTIER / MUSICOUILLEUR

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À propos des Pupi – pour clavier

Toujours composé sur un air original de Alexandre ASTIER pour la série Kaamelott, vu qu’il s’agit seulement d’une « réduction » pour clavier du même morceau.

Piano et mastering : Roman STARKMAN (Starkmanmusic)
Composition : Alexandre ASTIER / MUSICOUILLEUR

[téléchargement | partition]


Que m’a-t-il pris ? Pourquoi faire enregistrer cette musique basée sur un air dont je ne possède pas les droits ? Comment ? Notre envoyé spécial nous fait parvenir les dernières nouvelles du bordel qui règne dans mon cerveau.

Pour la genèse du morceau, je vous invite à lire cet article. Je vais maintenant aborder l’aspect pratique de la mise en œuvre.

Pourquoi et comment enregistrer ce morceau ?

La première question que je me suis posée était : comment faire enregistrer son morceau par des musiciens professionnels quand on n’a absolument aucune relation dans le monde de la musique, qu’on ne connaît pas le pays dans lequel on habite depuis presque deux ans, ni les milieux artistiques qu’il abrite ?

Naturellement, dans ces cas-là, on se tourne vers internet. Et il se trouve qu’un site permet effectivement de se payer les services d’artistes, d’artisans et de techniciens de tous niveaux dans à peu près tous les domaines imaginables : Fiverr.

On peut y fouiner à loisir, comparer en quelques clics les savoir-faire, l’expérience et les tarifs des artistes avec lesquels on envisage de travailler, afin d’obtenir un résultat qui soit un bon compromis entre ce qu’on a en tête et ce qu’on peut effectivement se payer.

Pour les petits budgets cela dit, deux choses à savoir : les prix affichés sur les annonces ne tiennent pas compte de la TVA, et il est de coutume de laisser un pourboire aux artistes une fois la commande livrée. À prévoir dès le départ dans le budget donc, pour éviter les surprises.

Surtout ne pas hésiter à bien discuter des spécificités de votre projet avec les artistes avant de les engager. La plupart vous proposeront des offres sur mesure, cela leur permettra d’ajuster leurs tarifs en fonction de la charge de travail estimée.

Je dois dire que je n’ai eu que de bonnes expériences en bossant par le biais de cette plateforme-là depuis un mois.

Et voilà donc le comment. Le pourquoi… me le suis posé qu’ensuite. Mais c’est venu. Je crois que j’avais vraiment envie de voir si tout ça sonnait bien, avec de vrais instruments, de bons musiciens, ou si c’était joli seulement dans ma tête. Après un petit paquet d’années passer à musicouiller tout seul dans mon coin, voir si j’arrivais à sortir un truc qui vaille le coup que ce soit joué par des humains.

À propos de la version originale

Guitares

Une fois la plateforme trouvée. Faut se lancer.

Par où commencer. Percussions ou cordes ? Je ne suis pas très sûr. Qui a le plus besoin de quoi comme support pour faire du beau boulot. Comme à ce moment-là je me dis encore que je n’aurais peut-être pas le budget pour me payer un percussionniste et que je m’occuperais peut-être moi-même de cette partie, je choisis de faire enregistrer la guitare et l’instrument encore inconnu pour la mélodie principale. Le musicien devra s’accompagner de la démo pourrie.

Je contacte Michele. Un Italien vivant en Espagne si je ne me trompe pas. Cet homme joue de tout un tas d’instruments à cordes pincées. J’écoute ses démos, il joue bien, on sent qu’il a de l’expérience, du feeling. Je sens directement qu’il sera capable de jouer ce que j’imagine comme je l’imagine et même mieux. Il va jouer la guitare classique et aussi l’instrument principal. Je ne sais pas lequel. Mais je sais que si je peux engager une seule personne pour jouer cette section mélodique, j’y gagnerai en cohérence.

Si c’était de la musique cubaine pure, pour l’instrument encore indéterminé, on aurait immédiatement opté pour un tres cubain. Mais là, j’avais en tête un truc un peu plus coloré. Dans ma démo l’instrument que j’avais fabriqué sonnait parfois même un peu comme un clavecin. Michele me propose la guitare portugaise. Instrument que je ne connaissais pas vraiment. J’écoute. Parfait. C’est exactement le son que je cherchais. On a simplement dû faire le deuil d’une note trop grave pour être jouée sur cet instrument. Ca m’a rendu très triste, mais Michele a habilement tourné l’affaire pour qu’à part lui et moi personne ne remarque rien.

J’écris les partitions. Mal. Je décide à passer du tempo magique de 55.5 bpm (non c’est pas magique, c’était juste le « sweet spot) à 56 bpm, trahison envers mon intuition profonde que je ne me pardonnerai peut-être jamais, mais qui me garantit que quelque soit le logiciel sur lequel enregistre chaque musicien, ils sera capable d’obtenir le bon tempo, certains n’acceptant pas les décimales. Je prie de ne pas avoir fait d’erreur en écrivant les partitions, puisque que je ne sais pas les lire moi-même à la volée.

Je les envoie donc à Michele. Je lui donne mes indications et m’excuse d’avance pour la guitare classique qui passe la moitié du morceau à jouer des bêtes octaves à la noire, puis je le laisse travailler. Quelques jours plus tard, il m’envoie ses deux pistes. Jeu impeccable, beau feeling, son magnifique. Je vois des petits anges, je peux passer à la suite.

Contrebasse

Je contacte Kentaro. Un Japonais vivant en France. Remarquez qu’en deux musiciens et trois instruments nous couvrons déjà quatre pays. Cinq avec moi Français vivant en Belgique. C’est beau l’internet.

Je lui écris une aussi mauvaise partition qu’aux autres, il n’y a pas de raison. Je lui donne mes indications. Je suis un peu gêné qu’il n’ait pas grand chose à se mettre sous la dent en terme de jeu. Les notes sont longues et peu nombreuses. Il me demande s’il peut modifier des parties pour les rendre plus dynamiques. Je lui réponds que pas trop. Je lui explique que je travaille en composant sur un morceau déjà existant et que s’il peut ajouter quelques notes et effets ici ou surtout là, il peut, mais qu’il ne faut rien enlever et qu’il ne peut pas modifier drastiquement le contrepoint. Il comprend très bien et enregistre sa partie en respectant de très près la partition, tout en ajoutant ici et là quelques effets percussifs, ou en choisissant de jouer une partie à telle octave plutôt qu’à telle autre. Bref, il trouve les moyens de s’amuser dans les limites du bac à sable, qui fait que tout le monde passe un bon moment à jouer.

Les contrebasses, c’est difficile à enregistrer. Et comme c’est difficile à enregistrer, c’est également difficile à mixer. Kentaro a très bien joué et très bien enregistré sa partie, cela dit, elle a eu un peu du mal à se faire sa place au mixage. Comme quoi, ça n’est pas une science exacte. Mais on en reparlera un peu plus bas. J’ai dans tous cas passé quelques belles heures à écouter le son de la contrebasse toute seule. Je voudrais toujours plus de contrebasse. Vous ne pourriez laisser au monde comme seuls instruments que des contrebasses et des clavecins que je m’en porterais très bien.

Bref, j’ai les guitares, j’ai la contrebasse. Passons aux percussions.

Percussions

Devant la qualité des pistes que j’ai reçues jusque là, je me dis que je ne peux pas tout gâcher avec des percussions virtuelles qualité merde. D’autant que si j’ai appris très vite fait les rudiments des rythmes traditionnels afro-cubains, je n’ai absolument pas le feeling et la connaissance profonde des percussions qui me permettraient d’imaginer et réaliser de jolis breaks, transitions, variations, et autre embellissements qui donnent toute la vie à un morceau. Je me résous donc à faire appel à un pro. Et je me prépare à casser la tirelire vu le nombre de percussions que j’imagine nécessaires.

Sur ce, je contacte Maciej. Fabuleux percussionniste Polonais touchant à tous les styles et possédant une collection énorme de percussions des quatre coins du globe. Le son de ses démos est impeccable. Je lui explique le concept, je ne lui écris pas de partition. Des partitions pour les percussions ? C’est bien au delà de ce dont je suis capable à ce jour. Je me contente de lui envoyer piste par piste les percussions que j’ai programmées pour la démo du morceau.

En quoi ? Un, deux échanges, Maciej comprend exactement ce que je veux, exactement ce qu’on peut ajouter ou retrancher, il me donne toutes les références que j’ai en tête et même celles inconscientes. On cause Buena Vista old school, danzón, musique andalouse. Bim boum badaboum. Quelques jours plus tard, Maciej ne m’envoie pas les 6 pistes de percussions que j’attendais, mais 15 pistes (enfin 24 si on compte les prises de sons multiples sur certaines percu). Tout un univers est là. C’est juste parfait. Je ne vous mens pas, j’ai dû écouter les percussions seules presque autant que le morceau finalisé.

À ce stade, ma seule angoisse est : vais-je réussir à mixer tout ça avec mon matos moisi.

Mix et mastering

La réponse est non. Je ne saurais pas faire. Et puis je ne veux pas. Je veux pousser l’expérience jusqu’au bout. J’ai fait enregistrer chaque partie par des musiciens professionnels, je veux un mix et un mastering professionnel. Le mixage, c’est l’étape où on peut tout consolider ou tout gâcher. Au choix.

Alors c’est reparti. Si sur Fiverr vous trouvez des centaines d’ingé son amateurs prêts à mixer vos morceaux trap, drill et hip hop, c’est une autre paire de manches de dénicher un professionnel spécialisé dans la musique acoustique/classique à des prix abordables pour moi.

Mais il s’en trouve ! Au moins un. C’est le cas de Francesco pour InABagRecords. Francesco et un ingénieur du son Italien, spécialisé donc dans la musique classique et acoustique.

Pour ceux qui ne savent pas, et il n’y a aucune honte à ça, le mix dont on parle ici n’a pas de rapport avec le travail de DJ. Pour résumer très vite, il s’agit de travailler le volume et le son de chaque instrument, ainsi que leur placement dans l’espace sonore, pour donner un tout satisaisant. Le mastering est l’étape suivante, qui sert à ajuster le volume global et parfois même la couleur d’un morceau, afin qu’il sonne à peu près de la même manière quelque soit la plateforme sur laquelle vous l’écoutez, et assurer une belle cohérence entre tous les sons. C’est le coup de vernis final quoi.

Eh ben quoi, le résultat du travail de Francesco, c’est ce que vous avez écouté. Évidemment, nous avons échangé durant tout le processus. Cet élément un peu plus fort, celui-ci un peu moins, là plus de punch, ici plus de douceur pour produire tel ou tel effet. Ce genre de choses. Ce qui était sympa avec Francesco, c’est que je lui fournissais une page de feedback à chaque fois qu’il m’envoyait une démo, et au lieu de répondre quoi que ce soit sur le moment par écrit, sa réponse était la démo suivante qui intégrait, avec goût, toutes les modifications que j’avais suggérées. C’était un régal. Zéro blabla, comme disait la pub.

À propos de la version pour clavier

Pour la version piano, j’ai simplement contacté Roman Starkman, lui ai refilé la partition horrible que j’avais préparée à la hâte, sans armure, avec des dièses et des bécarres dans tous les sens, en lui demandant de jouer le morceau comme il le sentait lui, jusqu’au tempo qu’il pouvait choisir. Roman a d’ailleurs eu la gentillesse de m’aider à réécrire la partition pour la rendre plus lisible. Il a lui-même enregistré et masterisé le morceau.

Quelques jours après la publication de cet article, je rendrai disponible toutes les versions du morceau dans la partie Grand Bazar du site, ainsi que les partitions. Laissez-moi quelques jours pour mettre de l’ordre dans tout ça.

Je dois vous dire que j’ai une pensée toute spéciale pour Roman, qui a appris le morceau et a enregistré son interprétation entre le 22 et le 24 mars 2022 depuis son logement à Kiev, en Ukraine, tout juste un mois après le début de l’invasion du pays par l’armée Russe. Je ne sais pas comment tu fais pour continuer à travailler et jouer dans cet environnement, Roman. Mais merci pour le morceau.

Le coût

Un tout petit peu moins de 500€ tout compris, enregistrements, mixage et masterisation des versions originale et piano, TVA et pourboires. Honnêtement, c’est pas cher vu la quantité de travail fournie, étalée sur cinq collaborateurs. Je me sens même un peu coupable, mais la vérité c’est que je n’aurais pas su débourser plus. Je m’en remets à ma conscience en me disant que j’ai bien détaillé les spécificités de chaque partie à chaque artiste avant de commencer, qu’ils m’ont chacun proposé leur offre sur mesure en fonction, et que je n’ai pas marchandé un seul centime sur les propositions qu’ils m’ont faites, ni tenté de les influencer en leur avouant que j’étais fauché. J’ai donc payé ce que chacun a estimé être le prix correct pour son service. Faut que j’arrête de me torturer. Vous inquiétez pas ça va passer.

Le résultat ?

Bah il me plaît beaucoup. Évidemment si j’avais tout su faire moi-même, ç’aurait été un poil différent, mais ça correspond quand même à 90% à ce que j’avais en tête. Je dis 90% (prononcer nonante pour cent), parce que je n’ai pas voulu jouer les control freaks, comme on dit. Tout en étant précis sur mes intentions et le résultat que je souhaitais, j’ai à chaque étape essayé de donner le maximum de liberté à chaque artiste, persuadé que le résultat ne serait que meilleur s’il trouvait à s’amuser en travaillant, s’il avait moyen de mettre sa touche personnelle là dedans, de s’approprier un peu le truc.

Deux regrets. Enfin, pas regrets, deux choix que j’ai dû faire et dont je ne sais pas encore si je les regrette ou pas. La basse passant mal au mix, on a dû forcer un peu sur l’égaliseur et la compression. Ça lui fait perdre de son naturel, mais ça confère le punch qu’il faut au morceau. Triste compromis, mais il faut en faire. Seconde chose, la guitare portugaise qu’on entend trop faiblement à la fin du morceau, tout ça parce qu’on a un peu trop poussé la basse, parce qu’il le fallait. Mais je ne voulais trop pousser la guitare portugaise, pour que ça reste le plus naturel possible (ce qui ne veut pas dire grand chose). Compromis, donc, résultant d’un précédant compromis. Je ne mens pas quand je dit que le mixage c’est l’enfer.

Pour la version piano, elle ne ressemble en rien à ce que j’aurais pu imaginer, et tant mieux ! Pour le coup il s’agissait d’avoir la surprise d’entendre l’interprétation personnelle qu’en ferait un pianiste habitué à divers genres. Comment allait-il comprendre le morceau. Quand il m’a envoyé sa piste, il avait nommé le fichier « fuga », ce qui m’a beaucoup fait rire, un peu flatté, et un rien culpabilisé de ne pas savoir véritablement composer une fugue dans les règles de l’art.

Que dire d’autre ? Je retravaillerai volontier avec chacune des personnes que j’ai pu rencontrer sur Fiverr. Faut juste me laisser quelques mois pour économiser à nouveau et trouver un encore plus chouette morceau à composer (là c’est peut-être en années que ça se compte). Un sur lequel je possèderais les droits à 100%, accessoirement.

Et Alexandre Astier dans tout ça ?

Eh oui. Maintenant comment et où diffuser ce morceau ? Composer un morceau sur la base d’une autre composition… Quelle connerie, hein ? Il va me falloir contacter le monsieur. Pas que j’envisage de faire le moindre sou avec ça, mais j’aimerais tout de même bien le diffuser gratuitement ici ou là (ici, c’est ce site, et là sans doute bandcamp, pas plus), sans avoir le gros nuage menaçant de l’illégalité au dessus de ma tête.

Par exemple, le percussionniste m’a demandé s’il pourrait faire figurer la piste sur son album de percussions et guitares en cours de réalisation, sur lequel il souhaite collaborer avec des musiciens d’un peu partout dans le monde. Bon ben, je peux pas lui dire oui. J’ai pas les droits. Je ne sais pas s’il souhaite le vendre, par exemple, son album. Si c’était le cas, et même si je ne lui demandais jamais rien en retour, ça impliquerait certaines démarches. Comprenez que j’aimerais simplement lui dire oui, bien sûr, tu peux l’utiliser autant que tu veux, fais-toi plaiz ! C’est pas tous les jours qu’on trouve un de mes morceaux si cool qu’on veuille le faire figurer où que ce soit.

Je vais donc essayer de contacter Alexandre Astier pour lui demander ce qu’il est possible de faire ou pas. Cela dit, quand un morceau est protégé et que son auteur est enregistré à la SACEM… la tâche devient ardue. Même Hugues Aufray a dû lui-même payer la SACEM pour que les enfants d’une petite école des campagnes aient le droit de chanter gratuitement ses chansons à la fête de fin d’année. Et oui, c’est qu’un pourcentage revient à la SACEM, ils ne lâcheront rien. Alors je ne me fais pas trop d’illusions sur les possibilités de parvenir à quoi que ce soit, même avec un éventuel accord direct du compositeur. Mais faut essayer.

Et puis comment le joindre, hein ? Fini le temps où il me suivait sur twitter, puisque j’ai supprimé mon compte il y a des années et changé de pseudo entre temps. Si c’était les années 90, je contacterais directement TV magazine, et ils me répondraient quelque chose du genre : pour joindre monsieur Astier, veuillez écrire à Alexandre Astier, 212 rue des grandes machines, M6, Paris CEDEX quelque chose. Mais nous sommes en 2022. Sans compte facebook, twitter, instagram, ça me semble bien compromis.

En attendant, vous pouvez toujours écouter ça ici. C’est déjà ça.

J’ai dû oublier plein de choses en chemin. Mais ça fait deux mois que je bosse sur ce morceau, je n’en peux plus. Je suis pressé de le partager et de passer à autre chose.


#370 – Les chemins de travers

Il y a deux mois, alors que je commençais à bosser sur ce visual novel dont je causais dans les articles de blog précédents, je sentais la motivation baisser à mesure que j’écrivais le scénario. Je me suis donc dit et si tu commençais à composer la bande son pour changer un peu. Et puis de bande son n’ai point composé. Je ne sais pas comment, mais j’ai bifurqué. Je me suis mis à apprendre les rudiments de certains styles de musique cubaine, et puis j’ai commencé à faire des trucs et des machins divers quand j’ai pigé qu’il était trop tard pour sortir un son cubano qui devienne un classique.

D’entre les trucs et les machins faits, je vous partage un petit morceau, qui n’a absolument aucun rapport avec le visual novel en cours de fabrication.

C’est dans la partie musicouilleur que ça se passe, ici précisément. Je vous y présente la version démo d’un morceau.

Je suis également en train de faire enregistrer ce même morceau par de vrais musiciens, un autre article suivra donc pour vous montrer ce que ça a donné, si ça a donné quelque chose, pour expliciter un peu la démarche car elle est nouvelle pour moi et un peu particulière, vous partager les partitions, ou simplement me justifier de mon incompétence musicale s’il s’avère que le résultat est vraiment catastrophique. Bref allez-y voir et n’hésitez pas à me faire des retours.

Musicouillerie #009 – À propos des Pupi – Démo

Hier, je parlais de musique chiante. Aujourd’hui, je vous partage un peu de ma propre musique chiante, mais une petite introduction s’impose.

Aux alentours de 2010, alors que je vivais à Canterbury, je redécouvrais Kaamelott. Par là je veux dire que c’était la première fois que je ne m’arrêtais pas juste 3 minutes devant un épisode qui passait par hasard à la télé. Je matais toute la série du livre I au livre V. C’était à peu près ma seule source de français en audiovisuel. Au cours de ce marathon, voilà qu’arrive le livre II et son épisode 83 : Pupi.

Pour ceux qui ne savent pas, les Pupi sont les marionnettes du traditionnel théâtre de marionnettes sicilien (Opera dei Pupi). Je savais pas avant d’aller voir sur Wikipédia.

L’épisode est particulier. Arthur, incognito sur une place de marché, assiste en bonne compagnie à un spectacle de marionnettes narrant les péripéties survenant à la cour de Kaamelott. Lorsque le spectacle est terminé, et alors que les marionnettistes remballent leur théâtre, Arthur reparaît, un enfant dans les bras. Vêtu de sa tenue de cour cette fois-ci, couronne sur la tête, il use de son autorité royale et fait rejouer le spectacle à la demande de l’enfant, payant tout de même les artistes d’une bourse.

On pourrait passer des heures à causer de cet épisode sous divers angles, mais ce qui a contribué à la place toute particulière que je lui accorde, en plus de son étrangeté, c’est en grande partie la musique. Et je ne suis pas le seul.

Il s’agit d’un thème, composé par Alexandre Astier, évidemment, qu’on peut entendre uniquement dans cet épisode, et que je me trimballe dans la caboche depuis maintenant plus de 12 ans. Il va, vient. Il vit sa vie d’air au creux de mes synapses. Un matin je me réveille, il est là. Le lendemain il a disparu, mais ce n’est que pour mieux reparaître quelques semaines plus tard à l’occasion d’un grand soleil, ou d’un soir qui tombe, ou d’une voiture qui passe. Bref, cet air est devenu un compagnon fidèle.

J’ai bien essayé d’en faire une ou deux reprises au cours des dernières années mais bof. D’autres l’ont déjà si bien joué au piano, à l’accordéon, en mode one man band… Et moi, rien. Que vous voulez que je fasse avec mes petits VST tout pourris et mon inaptitude à jouer du clavier ?

Mais il y a deux mois, vlà-t-y pas que je transcris le morceau et que je décide de diviser le tempo par deux à la louche et d’y ajouter une ligne mélodique. J’y ajoute aussi des parties de basse aux endroits où il n’y en avait pas dans l’original, ou là où je n’en ai pas entendu, je transcrivais à partir d’un enregistrement de qualité piètre.

Et voilà. J’avais accouché d’un petit caca musical de plus, et je l’aimais bien. J’ai pas su tirer la chasse et lui dire au revoir. Je ne sais pas pourquoi je me suis dit celui-là, je vais le partager. Ce n’est que l’air des Pupi joué très lentement avec une mélodie plus rapide greffée là-dessus et des percussions derrière. D’autant que je me suis ensuite rendu compte que plus tôt dans l’épisode on l’entendait déjà à un tempo très lent. Mais je sais pas. Je l’aime bien.

Le voilà donc ce morceau, version démo, À propos des Pupi. Essayez de pas être trop impressionnés par la qualité de tous ces instruments virtuels gratuits, ça vous divertirait du génie de mon œuvre.

À propos des Pupi – version démo – Alexandre Astier/Musicouilleur

Je ne sais pas ce qui, de la basse, des percussions originales ou des harmonies, me faisait ça, mais ça me grattait la partie de la tête où sont rangées les mélodies et les rythmiques afro-cubaines. Peut-être parce que ça faisait déjà un mois que je tentais de composer (sans que rien de formidable n’en sorte) des son cubanos et des boleros. Parce que j’adore certains types de musiques cubaines traditionnelles.

Pour autant, je crois vraiment que ma musique en dit moins sur mes goûts musicaux en tant d’auditeur, que sur les outils que j’ai utilisé, sur mes connaissances et mes lacunes musicales au sens large, sur les contraintes dans lesquelles je me crois obligé de travailler, sur ma curiosité, et sur ma fascination pour des sons inattendus qui se produisent par hasard et/ou par erreur et autour desquels j’essaie de broder quelque chose. C’est pour ça que ce ne sont jamais de très bons morceaux. Pas des trucs qu’on mettrait dans une playlist. C’est toujours des mélanges étranges. Rien de très marqué. Ça sonne bizarre, on ne sait pas trop dans quel slip on habite. C’est comme ça, je m’y fais.

Je vois souvent mes morceaux davantage comme de petits dessins animés sans images qu’autre chose. Voire simplement comme des génériques parfois. Des années 80-90, évidemment.

Ça n’a pas de rapport, mais vous savez quoi, je me demande si ce n’est pas simplement parce qu’il y a l’air des Pupi en boucle tout au long du morceau que je l’aime vraiment bien celui-là.

#349 – Rien de rien

Les jours où je ne sais pas quoi raconter ici ne sont pas des bons jours. Hier, par exemple, n’en était pas un, je n’ai rien posté. Aujourd’hui non plus, mais je me force.

Si je n’ai rien à raconter, c’est que je n’ai pas vécu grand chose, ou rien appris de nouveau, ou rien fabriqué, ou envie de rien, ou que je suis très fatigué. Bon. Mais alors, pourquoi ne pas écrire une note de blog non pas quotidiennement, mais seulement quand j’ai quelque chose à raconter ? C’est bien normal, en tant que lectrice ou lecteur, de se poser la question ainsi. Je préfère également la qualité à la quantité. Mais pas en tant que moi qui tient un blog.

J’essaie de me discipliner. J’ai très facilement tendance à ne rien faire, ou à laisser tomber ce que je m’étais dit que je ferais. Je ne vois pas bien à quoi cette tendance personnelle pourrait bien me mener si je ne faisais rien pour la contrer, mais je suis convaincu qu’en tout cas elle ne m’aiderait pas à mener une vie plus agréable sur le long terme. C’est pourquoi je me force chaque jour à écrire quelque chose. Pour contrer ma nature. Évidemment, ce n’est pas la seule chose que je fais dans ce but, mais ça fait partie du package.

Pardon ? Vous plaisantez j’espère. Si vous êtes chaque jour heureuse ou -reux sans avoir le moindre effort à fournir pour l’être, c’est vous qui êtes bizarre.

Mais il y a également le fait que je ne suis jamais très fier de ce que je fais. Ou alors pas longtemps. Il peut m’arriver d’être satisfait une journée ou deux d’une mélodie, d’un texte ou d’un dessin aboutis, mais ça ne dure pas. Dès les 48h passées, j’ai souvent la sensation que cela n’est rien, que je n’aurais jamais dû le partager, et une grande honte m’assaille alors. La honte c’est pire que tout. La honte me donne envie de ne plus exister. Malheureusement, je crois devoir admettre que c’est souvent la peur et la honte qui motivent mes actions quand je ne me surveille pas.

Imaginez donc si, n’écrivant un article que lorsque j’estime que j’ai quelque chose de digne d’intérêt à dire ou à montrer, je devais assumer la qualité de ce que je fais. Impossible. En postant quotidiennement, j’espère que quelques personnes trouveront au milieu de tout ça une ou deux choses à leur goût, mais je me protège puisque j’ai toujours la possibilité de dire tu sais, quand on doit poster tous les jours, c’est normal que la plupart du temps ce soit mauvais.

Si, et je dis bien si, je ne devais poster que quand j’estime avoir quelque chose de digne d’intérêt à montrer ou dire, je ne posterais donc jamais. Ou alors, j’effacerais mes notes au bout de 48h.

Si vous êtes fins raisonneurs, vous pourriez opposer à ma démarche le fait qu’il serait sans doute plus important de travailler à assumer de ne poster que des choses que j’estime d’intérêt sur le moment, et à ne pas laisser peur et honte me dominer ainsi. Mouais. Peut-être un jour. Ça ne résoudrait de toute façon pas l’aspect se tenir à une discipline de la chose. Alors pour l’instant, vous allez encore vous farcir du quotidien à qualité variable. Ne croyez pas que je n’ai pas également honte de ça aussi.

Hein ? Oui, toutes ces images sont réalisées sur Affinity Designer à partir d’étoiles générées en SVG dans le Regular Star Polygon Generator. C’est bien, vous suivez mine de rien.